C'est la St-Valentin,
c'est donc une histoire d'amour, mais pas entre un homme et une femme (quoi
qu'il y a de ça aussi) mais plutôt d'un couple pour leur studio à Taghazout. Dans 2 jours, nous
quitterons à regret le studio qui a été notre pied-à-terre depuis un mois. À très grand regret.
Il y a de ces endroits
qui viennent nous chercher, comme par magie, qui nous marquent et qu'on sait
qu'on n'oubliera jamais; qui nous habiteront mieux encore qu'on ne les a
habités et qu'on sait déjà que l'on voudra un jour retrouver. Notre studio à
Taghazout, une vingtaine de km au nord d’Agadir, est un de ces endroits, pour
une variété de raisons, la première étant évidemment la beauté du paysage qui
s'offre à nos yeux par les grandes fenêtres.
Le studio est construit
tout d'une pièce; c'est-à-dire que les comptoirs. les étagères, les bases du
fauteuil et du lit, les partitions entre les pièces sont toutes d'une venue en
plâtre. À part 2 tabourets, une petite commode et une table basse de bois, rien
ne bouge. Et rien, je soupçonne, ne se rénove. Et à part le fait qu'il y a peu
de rangement, c'est très bien comme ça. Les couleurs sont pastels et le divan
qui fait le coin est très, très long, à la marocaine, sans dossier mais avec
une multitude de coussins. La cuisine comprend une plaque chauffante avec 2
ronds, un frigo et un évier. La salle de bain: une toilette, un évier et une
grande douche. C'est juste parfait.
Nous sommes au 4ième
étage, le dernier pour les studios. 45 marches. Il n'y a que la terrasse
commune sur le toit au-dessus de nous. Les fenêtres donnent sur la plage. Oh,
oui, il y a bien quelques maisons entre nous et l'eau, mais ce qu'on voit
surtout c'est la plage où les mouettes se prélassent, les dromadaires se
promènent en quête de touristes à porter et les pêcheurs qui enlignent leur
chaloupes bleu ciel, bleu mer. Ah oui, il y a aussi les garçons et les jeunes
hommes qui se dessinent des terrain de foot dans le sable et y jouent tous les
jours, jusqu'à ce que la mer vienne effacer leurs hors jeu. Il y a aussi
quelques touristes, surtout avec des enfants, mais pas beaucoup car la grande
plage publique n'est pas loin et c'est là où se retrouvent surfers et
touristes. Celle-ci, la nôtre, c'est celle du village où les pêcheurs ont le
comptoir de poisson qu'on achète dès qu'il quitte le bateau et qui le préparent
selon le besoin.
De nos grandes fenêtre
on voit la plage, la mer, et la côte au loin vers le nord. Nous faisons face à
l'ouest et le soleil nous donne le spectacle chaque jour renouvelé de se
coucher dans la mer, parfois dans de légers bancs de nuages, toujours en
éclairant l'horizon d'une lumière orangée qui me hantera longtemps. 18h15,
fidèle, jour après jour.
Mais c'est le son
surtout qui meuble notre studio, nos lectures, nos repas, nos rêves, notre vie
qui nous manquera. En fait, une multiplicité de sons: les vagues, fortes,
insistantes, qui nous offrent leur symphonie de crescendos fracassants, avec
des mouvements plus doux et berçants. Les vagues qui nous offrent même des
grandes finales où on se surprend à pense: "Ah? c'est fini" puis,
après une pause dramatique, reprennent de plus belle.
Et en contraste absolu
au bruit des vagues, il y a le son des moteurs des chaloupes que les pêcheurs
font cracher à fond pour les tester avant de prendre le large. Ces moteurs
qu'on a surnommés nos tondeuses de mer, et qui s'activent juste avant l'aube;
oui, même elles me manqueront.
Et la petite fille qui
habite dans la ruelle en bas de chez nous qui a une si belle voix, forte,
impétueuse, qui crie à tue-tête sa joie et sa contrariété, qui lance des
"falla!" mille fois répétés (aucune idée de ce que ça veut dire).
Elle aussi me manquera.
Et les cris des
mouettes, les appels à la prière, le sermon du vendredi qui nous permet de
garder le fil des jours. Sans oublier le petit chien gueulard ou, aujourd’hui,
la petite chèvre qui bêle dans la ruelle.
Oui, du fond de mon
grand lit confortable d'où je peux voir la mer, ou encore dans la cuisine, en
train de couper des légumes pour le souper, aveuglée par le soleil, mon coeur se pince à l'idée de partir. Mais
nous pouvons dire "mission accomplie"; on voulait décrocher, on l'a
fait.
Merci Taghazout.
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