Quand on vit le tourbillon du voyage, les dates s'entre-mêlent et on inverse les choses...voici notre visite de Kérak, ou Al Karak, en Jordanie, la forteresse des croisées, construite par Renaud de Chatillon (le méchant du film Kingdom of Heaven).
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Vue du haut de Karak. On comprend sa valeur géostratégique... |
Après Petra nous avons
mis le cap sur Karak pour y visiter le château fortifié. Je ne sais pas si
enfant, vous avez eu cette image mythique de fortifications anciennes où on
pouvait imaginer des dédales de donjons, de passages souterrains s'étalant en méandres
sombres et mystérieux où de multiples aventures, tractations, pactes secrets se
déroulaient sous le couvert de couloirs cachés? Les châteaux que l'on visite de
nos jours nous montrent de vastes salles somptueusement reconstituées et
décorées, des tourelles nous offrant de magnifiques vues des environs, des
parapets où on peut déambuler sous le même soleil qui brillait sur les
aventures d'autrefois. Mais dessous, qu'y avait-il? Comment y vivait - et mourrait
- on?
C'est un voyage dans cet
imaginaire sous-terrain que nous offre Karak, une forteresse construite par les
croisées au 12e siècle sur les ruines de plus anciennes structures,
et reprise par le général du grand conquérant Salâh ad-Dîn,
mieux connu en Occident sous le nom de Saladin.
Oui, il y a bien toutes
les fortifications en hauteur d’où on voit approcher l'ennemi. Oui, c'est un
lieu d'où on peut apprécier l'importance stratégique et historique de son
érection. Mais on peut également descendre et s'engouffrer dans les couloirs en
labyrinthe qui sillonnent, sur plusieurs étages, les entrailles du château.
C'est avec un plaisir
enfantin que nous nous sommes un peu perdus dans ces dédales. Les filles ont
premièrement perdu François, et se sont elles-mêmes enfoncées dans les pièces
s'ouvant sur d'autres pièces, ces couloirs presqu'étouffants qui remontent ponctuellement
à la surface, comme pour y reprendre leur souffle. À droite ou à gauche? On est
déjà passé par ici, non? Regarde, il y a un autre étage plus bas! François a
fait la même découverte et erre lui aussi, heureux de ces labyrinthes.
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Une partie des cuisines, qui devaient, littéralement, nourrir une armée. |
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Le plaisir de se perdre dans le dédales de couloirs souterrains d'Al Karak. |
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Une meurtrière, au détour d'un couloir étroit, dans un mur caché... |
Au bout d'un moment, un guide
en vêtements traditionnels bédouins, fin cinquantaine, s'approche des filles et
les invite à entrer dans une salle sombre qu'il éclaire de sa lampe de poche en
expliquant qu'il s'agissait d'une chambre à coucher. Il prend plaisir à
utiliser le peu de français qu'il possède. Puis il les entraîne de pièce en
pièce, de bon pas, en énumérant et détaillant ce qu'il dévoile au regard grâce
à sa lampe: salle des cuisine, chambre à deux étages au bout d'un escalier noir
comme l'encre, prisons... François les retrouve et se joint à eux: d'autres
cuisines qui servaient à nourrir 10 000 personnes, les prisons où les
prisonniers ont marqué le passage des années par des inscriptions gravées dans
la pierre, les écuries sur deux étages, les lieux de culte, les presses de vin,
les explications se multiplient. Il s'appelle Adel, et il est taquin, il aime
jouer des tours. Il se dissimule dans des alcôves - et cache les filles avec
lui - pour surprendre François. Il nous aide à grimper où on ne devrait pas,
nous tient la main pour qu'on s'approche du bord d'ouvertures sur le vide, pose
en photo avec nous avec bonheur. Avec les filles, surtout. Il nous explique
qu'il a 10 enfants avec une seule femme. Il en est fier. Après tout, comme il
nous le rappelle, il pourrait avoir quatre femmes... Il semble TRÈS heureux de mettre son bras
autour de la taille de filles pour les photos. Rien de déplacé, simplement
étonnant en Jordanie. Il aura été un guide impeccable.
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Adel, toujours prêt à prendre Ève Marie dans ses bras... |
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Le trio rigolo. |
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Dans la catégorie 'on se moque de François': couché pour prendre une photo rase-motte de l'escalier de pierre. |
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Alors que l'immensité du château l'entoure, François s'attarde sur la photo d'une pierre. Quand on regarde les arbres de trop près, on ne voit plus la forêt??? |
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Eve Marie s'est débarrassé de François en le jetant aux oubliettes. |
Puis, après un lunch rapide,
on prend la route vers la mer Morte et ses grèves de sel. Objectif: se mettre
les pieds dedans.
La route est belle et
ensoleillée. On s’arrête sur le bord de la route, en haut d’une falaise
surplombant la Mer Morte, pour voir une formation rocheuse qui serait, selon la
légende, la femme de Lot, neveu d’Abraham. Cette dernière a été changée en
pierre lorsqu’elle s’est retournée au moment de la destruction de Sodome et
Gomorrhe.
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Statut de la femme de Lot, changée en pierre pour s'être retournée à la destruction de Sodome. |
De notre promontoire, on observe ce ce corps d'eau ultra-salin, le
point terrestre le plus bas au monde à 400 mètres sous le niveau de la mer. On
ne l'appelle pas Mer Morte pour rien; rien ne peut vivre dans cette eau
pourtant claire, qui devient trouble d'ondes salines dès qu'on la remue.
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Preuve qu'Ève Marie a bien été au bord de la Mer Morte... |
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...tout comme Florence... |
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...et François. |
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Formations salines au bord de la Mer Morte. |
Un peu
plus loin, alors que se prépare un majestueux coucher de soleil, on trouve un
endroit pour y tremper les pieds. On y goûte, juste pour voir... Ouache: plus
salé que ça, tu meurs. La plage de pierre est presque vide, si ce n’est la
présence de deux jeunes hommes Jordaniens, très BCBG. Le plus petit s’appelle
Ibrahim, le très grand Raffi. On se lance avec eux dans un concours de ricochet
de pierre. Et dans l’eau de la Mer Morte, on compte parfois jusqu’à 15
ricochets!!! Après le coucher de soleil, ils nous invitent à prendre le café à
côté du stationnement. On ne parle pas arabe, ils ne parlent pas anglais, sinon
quelques mots. On gesticule, on mime, on a du plaisir. La nuit tombée, on se
salue et on part chacun de notre côté, heureux d’un moment de communication
amicale alors que le soleil se couchait sur Israël, à quelques kilomètres de l’autre
côté de la mer, mais à des millions de milles de la réalité de nos copains
Jordaniens.
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Caillou attrapé en vol lors de notre joute de ricochet. |
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Flo commence par se mettre le doigt dans la Mer Morte. |
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Notre nouveau copain Ibrahim. |
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Couché de soleil émouvant. Au loin, Israël, que nous n'aurons pas l'occasion de visiter. |
Le lendemain, après
avoir à nouveau bravé le dédale des rues d'Amman, on se lance à la conquête de
Jérash, une des villes romaines les mieux préservées du Moyen-Orient.
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